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« On dit les idéologies mortes, mais les plus efficaces sont celles qu'on ne perçoit pas comme telles ». (Marc Augé)
Sur le thème de l'islamisme et le monde méconnu de la lutte bénévole qui le combat sur les réseaux sociaux, ce livre (« La grâce et les ténèbres », Calmann-Lévy 2020) est exaspérant et problématique. Polar géopolitique, document, ce livre est avant tout un essai parce qu'Ann Scott ne se limite pas à raconter une histoire ou à exposer objectivement des faits, mais présente, plus que de raison, sa pensée pénétrée d'une idéologie obsédante qui interpelle sur les rapports malsains que l'auteur entretient avec l'islamisme.
Les faits. le personnage principal, Chris, trentenaire, musicien incapable, bourgeois-bohème, sans personnalité ni conviction, tête à claques et exaspérant - bref, « jeune branleur » et bon à rien -, habite un appartement vide, trop grand pour lui, dans lequel il vit la nuit et dort la journée. Il tente, mais en vain, de composer sa musique. Influencé par les engagements de sa mère, climatologue, et de ses sœurs, photographe et reporter de guerre, il pense donner un sens à sa vie, le jour où, avec celles-ci, il découvre - peu après la présentation des images de l'exécution par l'État Islamique du journaliste, James Foley - un groupe d'anonymes qui lutte contre la propagande djihadiste sur internet, les « narvalos ».
Au début fasciné, il se lance dans la cybersurveillance pour, petit à petit, se détacher de lui-même au service d'une cause, une fois encore trop ambitieuse pour lui, qui le déborde jusqu'au stress posttraumatique.
Avant la parution de son premier roman « Asphyxie » (1996) - description de l'ordinaire d'un groupe punk américain en tournée en Europe, inspiré de Nirvana et des Sex Pistols -, Ann Scott ne trouvait pas d'éditeur. Puis vint la publication, quatre ans plus tard, de « Superstars » (Flammarion 2000), précédé de « Poussière d'anges » et, enfin, de « Cortex », (Stock).
Les ouvrages d'Ann Scott particulièrement psychédéliques, gravitent régulièrement autour des thèmes de la musique électronique, de la drogue - sans pour autant dénoncer celle-ci - de l'homosexualité et de la bisexualité, sur un ton prosélytique par un rejet subliminal de l'homosexualité lorsqu'elle déclare sur le média « Nulle part ailleurs » : « Autant la bisexualité est une forme d'équilibre pour moi, autant les relations homosexuelles que j'ai pu vivre ont été plutôt pathologiques »
Assurément sa rencontre, en 1995, avec la sulfureuse, contestée et contestable Virginie Despentes (1) - qui s'est récemment illustrée par des prises de positions racialistes - et aujourd'hui l'écriture de « La grâce et les ténèbres », trahissent Ann Scott qui entretient entre l'islamisme et d'autres structures extrémistes également répugnantes - l'ultra droite et autres organisations néonazies, notamment - une vision hiérarchisée singulièrement malsaine.
La rédaction de cet essai, pétri d'idéologies, expose évidemment l'auteur, pareillement à son ouvrage, à des critiques plus personnelles.
Mais je ne veux pas me fourvoyer dans le commentaire. Aussi, j'admets très volontiers que la présentation des « Narvalos » - sous certaines réserves tenant aux amalgames entre document et fiction, spécialement lorsqu'il s'agit de romancer les « loupés » des services du renseignement (attentat de Saint-Étienne-du-Rouvray, par exemple) en citant nommément les protagonistes des agressions islamistes et le modus operandi, procédé plus que discutable - est remarquable. le travail accompli par l'auteur, durant deux ans au côté du collectif de la « Katiba des Narvalos » (en arabe « Bataillon des fous »), constitué après les attentats de 2015 en France afin de collaborer, bénévolement à leurs risques et périls, auprès des services de renseignements, est louable et très instructif.
Et si l'on doit saluer, dans cet ouvrage, je ne sais quoi et je ne sais qui, ce sont bien ces anonymes et eux seuls.
Pour le reste, sur le fond, l'ouvrage d'Ann Scott est navrant d'idéologie et de dogmatisme contre-productifs.
« De quelque manière qu'on s'y prenne on s'y prend toujours mal » (Sigmund Freud)
L'ouvrage du médecin psychiatre Sylvie Wieviorka - HumenSciences, 2021(1) - n'est pas un traité de psychiatrie ni de psychanalyse. Pour autant, l'auteur ne s'abandonne jamais à la vulgarisation. S'obligeant à une définition simple et modeste - « la psychothérapie s'adresse à des personnes qui souffrent » - l'auteur écrit simultanément un récit et un essai, intelligent et intelligible, signé d'une longue expérience. Il interpelle prioritairement ceux qui, déjà affaiblis par des souffrances psychiques, seraient désireux de consulter, mais doutent de la pertinence et des conditions d'une démarche difficile, souvent perçue comme un espoir vain. Sylvie Wieviorka donne des informations et des conseils appropriés, illustrés de cas concrets et de dialogues rapportés, afin de réfuter aprioris et préjugés.
Tout homme qui a quarante ans n'est pas misanthrope n'a jamais aimé les hommes (Nicolas de Chamfort).
Le défenseur des droits proposait des lieux sans contrôles policiers, afin de ne pas "discriminer" une minorité de résidents de cités - une autre façon de créer des zones de non- droit.
Le même jour, France Culture saluait l'initiative d'un "centre de théâtre" invitant des jeunes"auteurs" à réécrire cinq pièces de Molière "afin de le rendre plus accessible" et de le "désacraliser".
Quel lien ? Une tragi-comédie !
" J'entre en une humeur noire, et un chagrin profond,
Quand je vois vivre entre eux les hommes comme ils font ;
« Il est préférable de guérir l’offense plutôt que de la venger. La vengeance prend beaucoup de temps, elle expose à bien des offenses ». (Sénèque)
Marc olivier Novak (Marco), le narrateur, ne vit que pour une atroce obsession, un projet effroyable et cynique - venger la mort de son fils. Robin était âgé de cinq ans lorsqu’il fut renversé par Frans Van Hagen, un chauffard en état d’ivresse qui prit la fuite après l’accident.
Le mariage et les relations sociales de Marco n’ont pas survécu au drame.
Frans est condamné à quinze ans d’emprisonnement. C’est insignifiant pour « ce fils de chien…. Quinze ans de taule pour avoir buté mon gosse…, et fauché trois vies… Que sont quinze ans de gnouf ? Une mascarade ! » (P.50).
Aussi, lorsque Frans est libéré, Marco met en œuvre une folle, démoniaque, et machiavélique entreprise de vengeance réfléchie et minutieusement préparée, durant quinze ans, à l’intention de « l’assassin » de son fils.
Joffrey Sinet est un écrivain publié en autoédition. Il enseigne le français et l’histoire en lycée professionnel. Épris de littérature, passionné plus particulièrement par les auteurs de romans policiers et de thrillers, « Le puits du fou » et son troisième ouvrage. (1)
Lorsque Joffrey Sinet choisit un narrateur interne pour relater son récit méphistophélique - en l’occurrence Marco, le personnage principal -, une plus-value est conférée conséquemment à son roman par l’amplification des émotions et l’identification du lecteur à celles-ci. Il serait faux de nier que c’est exactement ce à quoi aspire tout lecteur de romans - la décentration - ce mécanisme psychologique permettant d’oublier sa propre situation pour s’installer dans celle de quelqu’un d’autre, exprimée par : « je lis pour m’évader ».
Ainsi entendu, « Le puits du fou » est l’assurance d’une évasion et la promesse de suspense, d’horreurs, de malheurs et de sueurs froides.
Cela dit, le récit de Joffrey Sinet est-il strictement une fiction ? L’auteur et le narrateur ne se retrouvent-ils pas, à un instant du récit - la mort d’un enfant -, dans la réalité, quand d’autres situations ne seraient que fantasmées – comme l’exécution de la vengeance ? Certains propos de l’auteur, au chapitre des remerciements, permettent cette question qui n’est pas inutile eu égard à la nature de l’intrigue, de son intérêt et de sa portée également.
C’est pourquoi, « Le puits du fou » se place bien au-delà des polars ou des thrillers. Pour ces derniers, le caractère chimérique est assimilé par le lecteur qui, tout en frissonnant, sait qu’il se trouve « en territoire de fiction ». Alors, tous les bénéfices sont concentrés : divertissement - au sens pascalien - et frissons. La lecture du livre de Joffrey Sinet peut, de ce point de vue, se révéler moins confortable.
Pour autant, l’ensemble - une écriture irréprochable, des propos, des raisonnements, et des dialogues exquis, intelligents, jubilatoires, justes et saisissants de réalisme – offre de merveilleux et remarquables moments de lecture.
« Nous ne discutons pas la famille. Quand la famille se défait, la maison tombe en ruine » (Antonio de Salazar)
Dans l'atavique demeure de « Laurelfield », dans l'Illinois près de Chicago, l'aïeule centenaire, Violet Saville Devohr, qui jadis s'y serait suicidée, hante les lieux. Elle observe depuis son portrait suspendu au mur de la salle à manger, ses descendants et les résidents qui vont et viennent.
Sur le mode des poupées gigognes et empruntant un chemin à rebours, l'auteur écrit une saga familiale impertinente et audacieuse.
1999. le 31 décembre, veille du passage au deuxième millénaire, sont présents : Zee, enseignante universitaire, marxiste, qui dédaigne la fortune de ses parents, tout en profitant de celle-ci en habitant le domaine familial avec son mari, Doug, doctorant ès Lettres, ainsi que sa mère, Grace, aussi étrange que mystérieuse - dissimule-t-elle un abominable secret ? -, et son beau-père, Bruce, obsédé à faire des provisions pour prévenir la catastrophe annoncée du passage à l'an 2000.
1955. Grace et son mari, George - alcoolique et violent -, emménagent à « Laurelfield ». Mais Grace perçoit des indices dont elle est persuadée qu'ils augurent de mauvais présages dont certains sont comme surréels. Désormais, sa situation se trouve sens dessus dessous. Néanmoins, et fort heureusement, Grace s'agrippe à Max, le majordome. Mais celui-ci est également perclus de mystères se traduisant pour Grace par l'incapacité de celle-ci à découvrir qui est réellement la jeune Amy, la prétendue nièce de Max.
1929. « Laurelfield » est une colonie d'artistes accueillant le « gratin » de la création artistique de l'entre-deux-guerres, une communauté esthète et libertine.
Si l'on osait une comparaison artistique entre la littérature et l'opéra, on pourrait dire que le roman «Cent ans de Laurelfield », par opposition à un récit plus conventionnel, rappellerait l'une des traditionnelles altérités de l'art lyrique. Quand le « Bel canto » de Verdi commence par une ouverture qui expose, en quelques mouvements, l'intégralité et l'ampleur des passions en sursis, l'opéra Wagnérien joue de ressorts spéculatifs. Avec circonspection et toutes proportions gardées, l'on peut dire que Rebecca Makkai, dans « Cent ans de Laurelfield », déploie un récit aux allures wagnériennes par l'usage de thèmes étroitement imbriqués au sein d'intrigues, entremêlées les unes aux autres, parfois relevant de la magie, voire du mythe. de même, l'on retrouve des fondamentaux - leitmotivs et fils conducteurs - au soutien de la composition du récit exhaussé suivant une construction antéchronologique - de 1999 à 1900, en s'achevant par un prologue – où, à chaque instant, Rebecca Makkai révèle des messages au lecteur :
« Tout ce fichu siècle aurait eu bien plus de sens s'il s'était déroulé à rebours» (P. 154).
C'est un point essentiel qui traduit le coup de maître réalisé par l'auteur dans ce roman d'une intelligence outrageante. Mais que l'on ne s'y méprenne pas, pas de providence, ni Dieux ni Déesses sur la propriété de « Laurelfield », mais des intrigues et des personnages, de chair et de sang, empreints de points de vue contraires et opposés, magistralement mis en scène, qui demeurent et se meuvent, mais tous dans la filiation de générations successives.
Rebecca Makkai n'est pas avare d'intrigues et de contradictions dont« Laurelfield » est un modèle de creuset. Zee, universitaire marxiste, aux liens familiaux contrariés, accepte, toutefois, d'emménager dans la remise de la propriété avec son mari, Doug, astreint à rédiger, pour l'université, une monographie sur un mystérieux poète, Edwin Parfitt. Peu inspiré, il écrit en secret des romans pour jeunes filles. À la demande de Grace, les époux doivent partager cet espace avec le demi-frère de Zee, Case, et sa femme, Miriam, une artiste fantasque. Mais l'équilibre du couple formé par Zee et Doug semble être remis en question depuis l'arrivée des deux autres. Également, Amy, une jeune fille moquée pour son physique, qui est présentée par Max comme sa prétendue nièce, sème le trouble.
Les personnages du roman, qui évoluent au sein de conflits permanents, présentent tous les caractères pour s'y attacher ou les détester. Leurs défauts, leurs contradictions et leurs évolutions – à ce dernier égard, il est prudent de se méfier des apparences, les bons ne sont pas toujours ceux auxquels nous pensons. Mais, tous concourent à faire de cette fiction un excellent roman.
Quelques réserves cependant :
En premier lieu, sur ces deux derniers points – intrigues et personnages -, on ne saisit pas toujours, et pour tous, ce qu'ils deviennent au fil de la lecture et, plus particulièrement, dans la deuxième et la troisième partie du roman. Aussi, une seconde lecture - voire une deuxième - peut s'avérer nécessaire pour bien comprendre, le cas échéant, ce que sont devenus certains personnages et le sens de certaines situations (Zee et Max par exemple). Mais, tout compte fait, Rebecca Makkai n'écrit pas un roman sur ce qui va arriver, mais sur le passé révolu et le pourquoi de celui-ci que seul le lecteur peut saisir en fin de roman.
Ainsi, comme l'on sait, dans les années 20, « Laurelfield » était une colonie accueillant des artistes - dont Edwin Parfitt. Doug est persuadé que le grenier contient des archives et documents précieux pour son travail. Il s'affranchit, alors, de l'interdiction, très énigmatique de sa belle-mère, Grace, que seul le lecteur comprendra, mais plus tard, tout comme tant d'autres mystères et intrigues.
De même, mais ce point n'est pas en lien avec l'apparente tortuosité du roman particulièrement bien conduit, il faut lire une centaine de pages pour ne pas abandonner la lecture en cours de route. Si celles-ci ne sont pas outrageusement ennuyeuses, elles ne sont pas d'emblée passionnantes en raison, précisément, de la structure du roman et du fait que l'on ne sait pas très bien ce qu'il en est et où l'on va. Mais tout vient à point à qui sait attendre…
En bref, si le livre demande une lecture un minimum soutenue, il est extrêmement riche, intelligent et passionnant et, paradoxalement, léger et drôle sur fond de comédie, voire de satire historique, de spectres et apparitions, agrémenté d'humour à caractère sexuel, mais toujours spirituel.
Je conseille très vivement la lecture de ce roman.
L'anomalie d'Hervé le Tellier demeure, à ce jour, l'un des quatre
derniers romans retenus pour le Goncourt 2020. Et ce serait justice qu'il
décroche le Graal afin de poursuivre sa sainte quête littéraire.
Il est inutile de rappeler, en liminaire, un résumé du roman
tant le récit est aujourd'hui connu.
Sans restriction, le roman de Le Tellier est un chef-d’œuvre
- une fiction, et non de la science-fiction ou de la fantasy ; un roman
philosophique, inspiré de l'existentialisme sartrien (« l'existence précède
l'essence »), de Nietzsche (« l'éternel retour ») et même d'Emmanuel Kant (agis selon ce qui, selon toi, devrait être érigé en
maxime universelle) - qui interroge notre rapport à nous-même dans un monde en
perpétuelle attente de la caution d'autrui, de « likes » sur les réseaux
sociaux ; un monde dans lequel nous sommes devenus incapables de procéder à
toute introspection.
L'anomalie se lit aisément pour rassurer ceux qui viennent de lire
ce qui précède ; il est d'une intelligence remarquable ; d'une originalité
désarmante.
Mais, le jour où vous prendrez un avion pour New-York, ou
pour n'importe où d'ailleurs, assurez-vous que ce passager du siège numéro X
est bien vous-même, et non « une simulation » ou vôtre double qui attend,
quelque part à l'autre bout du monde, pour vous confronter à vos peurs, à vos
angoisses, à vos failles, à vos faiblesses, à vos petitesses, à votre part
obscure….
Une réflexion sur l'origine de la vie, son sens et son
objectif (final ?) ?
Elias Naccache, le très célèbre homme d'affaires franco-libanais dans le domaine des nouvelles technologies de l'information, a bâti sa fortune en rétrocédant opportunément sa première start-up juste avant l'explosion de la bulle spéculative d'Internet du mois de mars 2000. Quelques années plus tard, il renonce à tout, puis part pour la Syrie combattre Daech aux côtés des Chrétiens d'Orient lorsque, à la fin de l'année 2017, la presse révèle sa soudaine et mystérieuse disparition à Raqqa.
Le retentissement médiatique de l'affaire conduit un célèbre magazine, qualifié pour investiguer sur les « splendeurs et gloires déchues » du monde du spectacle, de la politique, de la mode, ou de l'actualité (Vanity Fair), à solliciter d'un écrivain la rédaction de la biographie de Naccache. L'auteur était connu pour ses chroniques sur France Inter. En outre, les deux hommes étaient amis d'enfance, écoliers en province, puis adultes à Paris, jusqu'à leur brouille, peu de temps avant le départ d'Elias qui manifestait des opinions politiques extrémistes de droite et identitaires.
Pour ce faire, le journaliste convoque ses souvenirs de lycéen en Pays de Loire, puis d'adulte à Paris ; il entend les témoins - amis épouse et maitresses, qui ont rythmé et influencé la vie de son ami.
Au début de l'année 2018, il entreprend l'écriture d'un ouvrage :
« Ce livre est le fruit d'un éclairage nouveau, tout en explorant certains aspects de la vie d'Elias qui m'avaient largement échappé. Ce récit peut être vu comme la version augmentée d'un programme défaillant. Je m'y suis autorisé un ton plus personnel ». (P.8).
Ce livre s'intitule « La déconnexion ». L'on comprend immédiatement la singularité du « roman » d'Éric L'Helgoualc'h qui prend la forme d'un récit dans le récit, d'une histoire dans l'histoire. L'auteur du livre, (le chroniqueur de Vanity Fair dans le « roman » d'Éric L'Helgoualc'h), n'est autre que le narrateur choisi par L'Helgoualc'h lui-même dans son propre roman.
Éric L'Helgoualc'h donne ainsi le ton et utilise intelligemment les modèles de la narration en provoquant volontairement une confusion entre l'auteur et le narrateur, entre la réalité et la fiction. Mais n'allons pas trop vite, nous reviendrons sur ce point essentiel du récit…
La « Déconnexion » est le premier « roman » publié par Éric L'Helgoualc'h aux Édition du faubourg. Sa critique n'est pas aisée, pour autant que l'on veuille être objectif. Et pour faire litière de chicanes ou controverses, celle-là aurait pu se limiter à : « Un récit intelligent soutenu par une expression linguistiquement remarquable, mais effroyablement manichéen et intellectuellement malhonnête en considérant que l'auteur, bien au fait de son sujet, fait preuve d'une parfaite mauvaise foi. ».
Un chouia sommaire…
En premier lieu, « La Déconnexion » est un roman très plaisant à lire et très bien écrit. Quand bien même l'intrigue peut, au premier abord, paraitre convenue - impression vite dissipée au deuxième - on ne s'ennuie pas un instant. le récit n'est pas, cependant, un polar ou un thriller comme certains commentaires ont pu le laisser entendre. le narrateur ne part pas «physiquement » à la recherche d'Elias Naccache et la question de son retour ou de sa disparition définitive ne semble pas essentielle à l'auteur. Les inconditionnels du suspense se délecteront cependant du dernier chapitre.
L'intrigue, infiniment plus subtile, concerne la perspective psychologique de la métamorphose d'Élias Naccache l'ayant poussé à se « déconnecter », à renoncer à la prospérité, à se radicaliser à l'extrême droite et à fuir combattre Daech en Syrie. La psychologie est omniprésente dans le roman autant dans l'analyse de la situation que dans celle des personnages du narrateur que d'Élias Naccache.