✍️ "Le livre est un miroir. Si un âne se regarde dedans, il ne peut pas s’attendre à y voir un apôtre". (Georg Christoph Lichtenberg)
📌Douze nouvelles pour franchir la porte du monde de Stephen King : Plus noir que noir, un recueil intense et accessible.
✓ Mon immersion dans les ténèbres : une première rencontre avec Stephen King à travers Plus noir que noir
Pour quelqu’un qui, comme moi, a déjà eu un aperçu de l’univers de Stephen King à travers une seule lecture, il y a longtemps, mais n’a jamais osé s’aventurer plus loin dans son œuvre, auréolée de sa réputation de maître absolu du genre, la sortie française de "Plus noir que noir" aux éditions Albin Michel en 2025 représentait une occasion idéale.
L’idée d’un recueil de douze nouvelles par un auteur aussi prolifique suscitait à la fois une certaine appréhension et une vive curiosité. Allais-je être immédiatement plongé dans un univers trop sombre pour un lecteur encore novice dans ce court format chez cet auteur ? Ou découvrirais-je, au-delà de la "peur" de cette nouvelle entrée, une richesse narrative insoupçonnée ?
✓ Diversité des atmosphères et richesse narrative
Dès les premières pages, ce qui frappe, c’est la diversité des atmosphères et des thèmes abordés. Loin de se cantonner à un seul type d’horreur, Stephen King explore différentes facettes de la noirceur, qu’elle soit surnaturelle, psychologique ou ancrée dans le quotidien.
Cette variété constitue, pour un quasi nouveau lecteur de Stephen King, un atout majeur. Elle permet de découvrir l’étendue de son talent et de ne jamais s’ennuyer, même si certaines histoires résonnent plus que d’autres.
Bien que n’ayant aucune base de comparaison solide avec ses autres écrits, mon expérience de lecture de "Plus noir que noir" s’est révélée captivante et m’a donné un aperçu de la capacité de l’auteur à manier différents genres au sein d’un même recueil.
L’hétérogénéité des récits, allant du fantastique pur à des explorations plus ancrées dans la réalité humaine, rend ce livre particulièrement accessible à ceux qui hésitent à se plonger dans l’univers de Stephen King par crainte d’une horreur trop uniforme.
✓ "Le mauvais rêve de Danny Gauglhy" : un récit marquant
Parmi ces douze récits, Le mauvais rêve de Danny Gauglhy (Danny Coughlin's Bad Dream) a particulièrement retenu mon attention. Plus long que les autres nouvelles, frôlant le format de la Novella, ce récit nous plonge dans le cauchemar vécu par Danny Coughlin, un concierge de lycée qui fait un rêve prémonitoire d’un meurtre et se retrouve, après avoir signalé sa découverte, suspecté par la police.
L’engrenage implacable dans lequel Danny est pris, malgré son innocence, m’a tenu en haleine. Cette histoire m’a étrangement rappelé "La Promesse" (¹) de Friedrich Dürrenmatt (²). Bien que les contextes soient différents, on retrouve dans les deux œuvres ce thème d’une quête de vérité ou de justice qui vire à l’obsession, face au doute et à la pression sociale.
Dans "La Promesse", le commissaire Matthias s’engage sur son honneur à retrouver l’assassin d’une enfant et cette promesse le consume. De même, dans Le mauvais rêve de Danny Gauglhy, l’acharnement du détective Jalbert à vouloir prouver la culpabilité de Danny fait écho à cette obstination.
L’atmosphère dans les deux récits est également pesante et troublante, où la frontière entre la réalité et la perception des personnages devient floue. Une forme de mélancolie, voire de tragédie, se dégage de ces deux histoires, où la conviction des protagonistes a un coût personnel élevé.
Ainsi, même pour un lecteur novice de Stephen King, la puissance du thème de l’accusation injuste et de l’obsession se révèle universelle.
✓ Profondeur métaphysique et symbolisme
Au-delà de cette histoire particulièrement marquante, en prenant le temps de laisser infuser ces récits, j’ai commencé à percevoir des motifs plus subtils.
J’ai beaucoup aimé aussi Laurie ainsi que L’Homme aux réponses.
Il ne s’agissait plus seulement de l’horreur immédiate, mais de la façon dont Stephen King utilisait l’espace, les idées métaphysiques et même la narration elle-même pour créer une expérience de lecture plus riche.
J’ai été frappé par la manière dont les lieux dans Plus noir que noir ne sont pas de simples décors. Ils semblent souvent porter un sens symbolique qui enrichit l’histoire. Par exemple, dans Écran rouge, les écrans rouges des iPhone ne sont pas de simples objets technologiques, mais deviennent le signe tangible d’une intrusion angoissante de l’inconnu dans le quotidien.
La station-service abandonnée dans Le mauvais rêve de Danny Gauglhy évoque un sentiment de déclin et de secrets enfouis.
Même Central Park dans La Cinquième Étape, bien que lieu de rencontre, porte en lui une tension liée à la vulnérabilité des personnages.
Ces détails prennent une dimension symbolique, représentant peut-être l’intrusion de l’inconnu dans notre quotidien ou des états émotionnels profonds.
Ces espaces ne sont pas seulement des décors, ils paraissent poser des questions plus profondes.
Le mauvais rêve de Danny Gauglhy nous confronte à l’idée de rêves prémonitoires et du destin.
Des histoires comme Finn et L’Homme aux réponses explorent le rôle de la chance et du destin dans nos vies.
J’ai eu l’impression que, sans donner de réponses faciles, Stephen King nous invitait à réfléchir à ces questions métaphysiques.
En réalité, sous le prétexte de l’horreur, voire du fantastique, Stephen King déploie une riche trame métaphysique et symbolique pour délivrer ses messages.
J’ai particulièrement apprécié cette profondeur, tout comme l’utilisation de la métafiction qui, par ses clins d’œil et ses mises en abyme, sert admirablement ces aspects.
De même, la mention de notes en italique à la fin de certaines nouvelles, comme la référence à Flannery O’Connor après Sur la route de Slide Inn, m’a semblé être une façon de souligner les influences littéraires et de rappeler que ce que je lisais était une construction.
La découverte de ces éléments – les espaces symboliques, les questions métaphysiques et ces clins d’œil métafictionnels – a vraiment enrichi ma lecture. Cela m’a montré que Stephen King ne se contente pas de raconter des histoires pour faire peur. Il utilise le genre pour explorer des thèmes plus complexes et pour nous faire réfléchir sur le monde qui nous entoure et sur la nature même de la fiction.
✓ Conclusion : une porte d’entrée réussie
Cette première incursion dans ce court format de l’univers de Stephen King a été une expérience très positive.
Loin de me rebuter, elle a au contraire éveillé en moi le désir de découvrir d’autres facettes de son œuvre.
Ce recueil de nouvelles s’est révélé être une excellente porte d’entrée, offrant un aperçu de la richesse de son imagination et de sa capacité à explorer différents aspects de la nature humaine à travers le prisme du fantastique et de l’horreur.
Je recommanderai sans hésiter Plus noir que noir à quiconque souhaiterait découvrir l’univers de Stephen King sans se sentir submergé par l’ampleur de certains de ses romans.
📖 Chronique rédigée par Michel BLAISE – © 2025 - Le Lecteur Impertinent
1 - Cliquez sur le titre du livre, (lien Solal overlog) vers un blog relatif à la promesse extrêmement intéressant,
2 - Chronologie : vie et œuvre de Friedrich Dürrenmatt
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